Si tous les pilotes savent combien « voir la terre vue du ciel » est un privilège qui nous est accordé, c'est bien au travers le partage de la passion du vol, notamment avec un passager, que la beauté des paysages se dévoilent à nouveau. Figer un instant le ciel par la photographie, c'est tenter d'immortaliser un instant de grande liberté et un paysage éphémère, révélé devant nos yeux.

Passionné de photographie depuis longtemps, je me suis professionnalisé que depuis peu. Impacté par la crise du covid 19 sur l'activité économique de ma société (baptême de l'air, formation ulm pendulaire et paramoteur électrique), la pandémie m'a permis de prendre la décision d'afficher mon statut d'artiste photographe en tant que professionnel indépendant.

Mais devenir photographe aérien ou se dire professionnel de l'image ne s'improvise pas !

L'ulm est une alternative entre le drone et l'hélicoptère. Son coût d'utilisation est réduit et son impact carbone faible. Mes équipements de bord me permettent le survol de zone réglementée, ce qui a contribué à ma notoriété et mon professionnalisme dans des zones du sud de la France comme Toulon APP, la R95 du Luc ou le survol de parc naturel avec autorisation.

Inscrire mon travail dans une démarche artistique est une volonté que je porte.

Mon éthique entrepreneurial et mes valeurs personnelles ont toujours orientés mes travaux autour de l’environnement. Initiateur du concept de vol éco-responsable et de nombreuses réflexions sur le développement durable auprès de la FFPLUM, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi cette thématique est tant négligée, rarement portée et peu soutenue. Pourtant le sujet environnemental est aujourd'hui au cœur de notre société, de nos activités, de nos entreprises.

Pour proposer une réflexion artistique autour de ce thème, dans mon département du Var, j'ai choisi de réaliser une exposition avec 39 clichés de mes photographies aériennes, sélectionnés autour d'une déclinaison de la palette chromatique. Elles viennent chacune illustrer les problématiques environnementales tout en montrant que la nature est incroyablement belle. Les photographies sont prises localement ce qui permet aux visiteurs d'identifier les lieux et de ramener les enjeux mondiaux à une échelle locale. Mais chaque photographie ne serait rien sans l'association d'un commentaire écrit par l'auteur, accompagnant l'oeuvre dans une réflexion à trois lectures de l'image et renseignant le visiteur sur le lieu de la prise de vue.

L'exposition « Palette Terre de Provence » est actuellement visible jusqu'au 30 novembre au sein du cloître de la Cathédrale à Fréjus, appartenant au centre des monuments nationaux, partenaire de l'exposition.

Aujourd'hui, dans tous mes vols, il m'est impossible de ne pas voir une trace de pollution vue du ciel. Je suis constamment le témoin d'un brouillard grisâtre au dessus d'une agglomération, de longues traces en mer, des débris multiples et décharges sauvages, des fermes photovoltaïques, de centrale et pylônes électriques, la superficie croissante de l'urbanisation à outrance prise sur le patrimoine agricole ou forestier, l'assèchement des sols et des cours d'eau, etc...

Ma démarche n'est pas de photographier des catastrophes environnementales, des images clichées de notre effondrement ou de notre surconsommation mais bien de montrer que toute beauté détient une part de laideur. La surconsommation de l'image, nous fait poster de trop nombreuses photos sur les réseaux sociaux, dont les filtres automatisés inhibent notre regard et rend discount notre perception du beau.

Dans le ciel, un passager néophyte ou l'apprenti pilote, trouvera que la vue est « magnifique » et que « tout est beau » vu d'en haut. Alors, continuons simplement à transmettre le rêve d'Icare dans les yeux des passionnés ; défendons notre activité aérienne porté par une image et des valeurs plus éco-responsables et continuons à regarder notre planète vue du ciel avec émerveillement, avec les yeux d'un enfant.

 

Ted Szymczak

Instructeur ULM