Dans notre Lettre d’information du 26 février 2021 nous abordions l’intérêt de ces nouveaux dispositifs de prévention de collisions en vol utilisables sur nos aéronefs pour mieux se VOIR et être mieux VU, afin de s’ÉVITER.
Précisons en préambule que l’objet de ces équipements n’est en aucun cas de remplacer le « Voir et Éviter » du concept du vol VFR, mais ils permettent tout simplement, sans aucune contrainte ni obligation, d’améliorer la sécurité en apportant une aide aux pilotes qui le souhaitent. D’une part, ils permettent d’être « visible » électroniquement et, d’autre part, d’avoir une information sur la position des appareils situés dans son entourage immédiat. Les pilotes peuvent donc regarder du bon côté, en disposant, si besoin, d’une alerte (visuelle et sonore) si les trajectoires convergent et présentent un risque potentiel de collision et ainsi d’effectuer un évitement.
Plusieurs matériels sont actuellement disponibles et nous en avons testé quelques-uns pour se faire une meilleure idée de leur fonctionnement dans différentes situations de vol : ça marche très bien !
Une solution particulièrement innovante vient d’arriver ce 28 mars 2021 par nos amis pilotes d’ULM du côté de la Belgique avec le développement de l’application SAFESKY (https://www.safesky.app téléchargeable directement et gratuitement sur vos smartphones ou tablettes connectés IOS ou Android)
Application SAFESKY
L’intérêt de ce système est, d’une part, qu’il ne nécessite qu’un simple smartphone, et d’autre part, qu’il est gratuit dans sa version de base, ce qui le rend accessible à tout type d’utilisateur quel que soit l’aéronef. Le fonctionnement est extrêmement simple : il transforme votre téléphone en émetteur visible (position GPS en 3D) par tous les autres utilisateurs et vice-versa, de façon anonyme ou non à votre convenance. Les données sont échangées via le réseau GSM au sol, les nombreux tests effectués ont démontré une excellente couverture entre 0 et 5 000 ft, c’est là que se situent les plus grands risques de collision.
Application SAFESKY
Nous avons aussi testé un autre dispositif particulièrement abouti, le FLYING NEURONS (https://www.flyingneurons.com) développé dans le sud de la France. Il s’agit d’un tout petit boîtier (5 cm/40 gr) de haute technologie et muni d’une mini-antenne. Celui-ci se connecte par Bluetooth avec un smartphone grâce à une application dédiée. Dans cette solution, les boîtiers dialoguent directement entre eux jusqu’à 15 km, même sans couverture GSM, comme pour le FLARM. Toutefois, ils peuvent partager les données par le biais du smartphone connecté au réseau GSM, ce qui permet de voir et être vu par d’autres systèmes. Ce dispositif intègre d’autres fonctionnalités particulièrement élaborées, comme le suivi des vols en 3D en temps réel ou en replay à partir d’un PC (très pratique pour la formation), et une fonction SOS qui permet d’une simple touche de lancer un appel à tous les boîtiers en vol aux alentours en donnant automatiquement sa position, associée à un message GSM si couverture réseau GSM, ce qui en fait aussi une balise de détresse.
Dispositif FLYING NEURONS
Sans être exhaustif, on peut également citer plusieurs autres systèmes existants : Power FLARM installé sur la plupart des planeurs, Funk Tm250, Paradar, Rosetta/Pilot Aware, SkyEcho, Stratux, Zaon…
La faiblesse et le point commun de tous ces dispositifs est qu’ils ne dialoguent pas directement entre eux, ce qui a pour conséquence d’une façon générale qu’ils ne voient pas tous les autres aéronefs en vol autour d’eux… mais alors comment faire ?
Faute d’une norme universelle à ce jour (qui n’arrivera sans doute jamais !), il existe néanmoins une solution que certains matériels ont commencé à exploiter : c’est l’utilisation d’une plateforme permettant « l’interopérabilité » des systèmes par le partage de leurs données de positions. Inutile donc de l’inventer, cette plateforme « collaborative ouverte » existe déjà, il s’agit d’OGN (Open Glider Network), initialement développée pour le partage des données FLARM pour les planeurs qui intègre déjà 5 autres types de données. Après avoir échangé avec les responsables d’OGN, ils confirment la possibilité d’intégrer d’autres sources de données partagées, afin de permettre la visualisation d’un maximum d’aéronefs en vol quel que soit le système utilisé. Les échanges de données « de » et « vers » la plateforme OGN sont réalisés par le réseau GSM et/ou des antennes dédiées, selon les équipements pour permettre aux pilotes de les visualiser en vol.
L'application FLYING NEURONS en vol
La FFPLUM encourage vivement tous les développeurs de ces systèmes de se tourner vers OGN pour la mise en commun de leurs données de position des aéronefs avec une réciprocité mutuelle. L’objectif atteignable serait d’avoir la meilleure connaissance possible du maximum de trafics dans son environnement direct par ce partage des données.
Concernant les transpondeurs, il faut savoir que dans beaucoup de pays, dont la France, on ne peut visualiser en vol que les transpondeurs ADS-B out, car ils émettent leur position GPS de manière autonome, ce qui permet de remonter ces informations en temps réel vers les systèmes d’information de prévention des collisions décrits ci-dessus.
Cependant, les aéronefs d’aviation générale et de loisirs sont simplement équipés d’un transpondeur mode S (et C pour les plus anciens) qui ne sont pas visibles par les autres aéronefs (seuls les radars des contrôleurs aériens connaissent leur position). Mais comment pourrait-on se satisfaire, alors que la technologie le permettrait à moindre coût, de ne pas pouvoir visualiser et utiliser la position des aéronefs équipés de transpondeur mode S pour prévenir des abordages ? Ceci demeure une réelle difficulté à laquelle il faudrait rapidement s’attacher au nom de la sécurité et de l’intérêt général, pour engager une réflexion avec nos gestionnaires de l’espace aérien, d’autant que ces données existent.
Démonstration du dispositif FLYING NEURONS
L’EASA se montre particulièrement encourageante sur l’apport de ces dispositifs pour la sécurité de l’aviation générale, soulignant que l’absence de certification pour ces dispositifs stimule l’innovation, par des développements rapides avec les meilleures technologies et des coûts très abordables.
En synthèse, nous vous invitons à avoir la curiosité d’aller voir sur les sites internet qui présentent ces solutions très innovantes et surtout de les tester par vous-mêmes, vous serez rapidement convaincus de tout l’intérêt que cela pourra vous apporter en matière de sécurité, en rendant le ciel plus sûr pour tous.
Plus nous serons nombreux à les utiliser, meilleure sera notre sécurité collective. Le risque de collision en vol demeure une préoccupation majeure pour l’ensemble des pratiquants de toutes les formes de vol, alors pourquoi se priver d’une aide simple si cela peut éviter de nouveaux accidents comme celui de 2020 qui nous a tous marqués de la collision entre un avion et un ULM qui a fait 4 victimes ? Quel pilote n’a pas un jour été surpris par la proximité d’un autre aéronef qu’il n’avait pas vu ?
Bien sûr qu’aucun système si perfectionné soit-il n’apportera une solution qui remplacera la surveillance visuelle constante du pilote qui reste le seul maître à bord dans son environnement, car le ciel est un espace partagé y compris avec les oiseaux, mais pas de doute que ces dispositifs peuvent nous faciliter la tâche d’observation, en nous indiquant l’appareil que l’on n’a pas vu et réciproquement, à cause d’un angle mort ou d’une luminosité difficile, pour nous prévenir d’un risque d’abordage en vol, sans pour autant réduire notre liberté.
Louis Collardeau
1er Vice-Président de la FFPLUM
Président de l'EMF